Le programme des Premiers Secours en Santé Mentale (PSSM), introduit en France en 2023, sous l’impulsion du président Emmanuel Macron et inspiré du modèle australien, il offre un apport de connaissance en entreprise, mais ne doit pas être confondu avec la prévention des risques liés aux facteurs psychosociaux. Ce programme se concentre sur l’aide aux salariés en difficulté, en se basant sur les symptômes et les dommages et non sur les causes des problèmes de santé mentale.
Découvrez comment le PSSM peut être intégré en entreprise tout en restant conscient de ses limites et de la nécessité de véritables actions de prévention des risques psychosociaux.
Table
Les Premiers Secours en Santé Mentale (PSSM), connus internationalement sous le nom de Mental Health First Aid (MHFA), ont été initiés en Australie en 2001.
Le PSSM a été développé pour répondre à une demande croissante de soutien face à l’augmentation des troubles de santé mentale.
Depuis, plusieurs études ont tenté d’évaluer son efficacité en milieu professionnel.
Voici les résultats après plus de 20 ans de pratique :
- Amélioration des connaissances et des compétences : Les participants aux formations MHFA/PSSM ont montré une meilleure compréhension des troubles mentaux et une capacité accrue à intervenir auprès de collègues en détresse.
- Réduction de la stigmatisation : Les formations ont contribué à diminuer les préjugés envers les personnes souffrant de troubles mentaux.
- Augmentation des interventions précoces : Les employés formés étaient plus enclins à identifier et à soutenir des collègues présentant des signes de détresse, facilitant ainsi une orientation vers des soins individuels appropriés.
| Points forts | Points faibles |
| Formation Accessible: à tous, permettant à un large éventail de personnes, y compris les employés, d’acquérir des compétences en matière de santé mentale. Démarche Citoyenne: La formation vise à déstigmatiser les troubles psychiques Intervention Précoce: Les secouristes formés peuvent identifier et intervenir rapidement en cas de détresse psychologique. Adaptation aux Contextes: La formation est adaptée à différents publics, y compris les jeunes et les professionnels en contact avec des populations vulnérables. Réseau International: L’appartenance à un réseau international de secouristes en santé mentale permet de partager des bonnes pratiques et d’améliorer continuellement le programme. | Stigmatisation Persistante: Malgré les efforts de déstigmatisation, la santé mentale demeure un sujet tabou dans de nombreuses entreprises. Manque de Sensibilisation: Une faible partie des employés veut être informée sur les troubles mentaux Ressources Limitées: Les entreprises peuvent rencontrer des difficultés à financer les formations ; Qualité vs Quantité: L’objectif ambitieux de former 750 000 secouristes d’ici 2030 soulève des questions sur la capacité à maintenir la qualité de la formation tout en augmentant le nombre de formés. Évaluation de l’Impact: il peut être difficile de mesurer l’efficacité réelle des formations. |
Les PSSM en Australie ont montré des bénéfices en termes de sensibilisation et de soutien entre collègues.
Cependant, elles ne remplacent pas une prévention construite, efficace des risques professionnels, et plus particulièrement sur les risques liés aux facteurs psychosociaux.
🔎 Exemple pratique : Dans une grande entreprise de services, plusieurs managers ont été formés au PSSM et sont désormais capables de détecter les signes d’épuisement chez leurs équipes.
Lorsqu’ils identifient un salarié en difficulté, ils peuvent offrir un premier soutien et l’orienter vers les ressources appropriées, comme le service de santé au travail ou un psychologue. Toutefois, elle intervient après que le problème ait déjà émergé. Ce processus ne s’attaque pas aux causes pour lesquelles ces signes d’épuisement sont apparus, telles qu’une charge de travail excessive ou des délais irréalistes, qui nécessitent des mesures de prévention.
Pourquoi ce n’est pas de la prévention des risques professionnels ?
Le PSSM est une approche de protection ou d’intervention et non de prévention.
Voici les raisons :
- Le PSSM n’agit pas sur les causes des troubles psychosociaux :
- Il n’adresse pas les causes organisationnelles comme une charge de travail excessive, un management inadapté, ou des horaires déséquilibrés.
- Il ne réduit pas l’exposition des salariés aux dangers (stress chronique, harcèlement, isolement, etc.).
- Il intervient après l’apparition des symptômes :
- Le PSSM aide à détecter des salariés déjà en souffrance psychologique.
- Par exemple, un salarié confronté à un burn-out sera pris en charge après coup, mais les conditions de travail ayant conduit à cette situation ne sont pas modifiées par le PSSM.
- Manque d’impact sur la réduction des dangers :
- Aucun indicateur concret ne montre que le PSSM réduit les causes des risques professionnels.
- Au contraire, il peut servir à masquer les lacunes en matière de prévention, en donnant l’impression qu’on agit sur la santé mentale, alors qu’aucune action préventive réelle n’est entreprise.
Si ce programme offre effectivement un soutien pour repérer et aider les salariés en situation de détresse psychologique,
il est crucial de comprendre que le PSSM ne constitue pas un outil de prévention des risques psychosociaux (RPS) en entreprise. Contrairement aux actions de prévention,
Le PSSM se concentre sur les symptômes et les dommages déjà présents, laissant de côté les dangers, les situations dangereuses, l’exposition des salariés qui génèrent ces risques.
Limites du PSSM : aucune prise en charge thérapeutique en entreprise
Il est également important de souligner que, selon le Code du travail et les réglementations sur la santé au travail en France, il est interdit d’effectuer des soins en entreprise si l’on n’est pas un professionnel de santé qualifié. Même si le PSSM ne vise donc pas à remplacer une prise en charge thérapeutique. Son rôle se limite à une première évaluation et à l’orientation vers des professionnels qualifiés.
Le PSSM ne peut donc en aucun cas se substituer à cette prise en charge.
Les risques liés aux facteurs psychosociaux (RPS) en entreprise sont des facteurs tels que Intensité du travail et temps de travail – Exigences émotionnelles – Autonomie – Rapports sociaux au travail – Conflits de valeurs – Insécurité de la situation de travail.
La prévention des RPS vise à identifier et à éliminer ces causes avant qu’elles ne provoquent des dommages. Donc les entreprises qui conduisent une réelle démarche de prévention agissent sur possibilité que les dommages surviennent et du coup, il n’y a plus besoin de PSSM.
Le PSSM permet de fournir un soutien immédiat, il intervient à un stade où les dommages sont déjà présents. Ce programme n’a pas pour vocation de traiter les dangers.
En effet, la prévention en entreprise repose sur l’analyse des situations de travail, et la mise en place de mesures de prévention selon l’article L4121-2 du Code du travail qui impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs en agissant sur les causes.
🔎 Exemple pratique : Une entreprise industrielle a constaté une augmentation des arrêts maladie pour cause de stress. Après avoir formé une partie de son personnel au PSSM, elle a pu mieux gérer les situations de crise. Cependant, en parallèle, elle a entrepris une analyse approfondie des conditions de travail et a identifié que les horaires de travail irréguliers et les objectifs mal définis étaient des facteurs de stress majeurs. Pour véritablement réduire les risques, l’entreprise a mis en place un plan de prévention, incluant des horaires plus flexibles et une meilleure communication sur les attentes, complétant ainsi l’approche du PSSM.
Différence entre prévention des risques et protection
- La Prévention : vise à éviter les dangers en agissant à la source. Cela inclut la réduction ou l’élimination des facteurs de risques avant qu’ils ne provoquent un dommage. Par exemple :
- Identifier les causes des troubles psychosociaux (charge de travail, horaires, management toxique).
- Modifier l’organisation du travail, agir sur les emplois du temps, les horaires
- Réguler la charge de travail,
- Organiser l’accueil du public, la gestion des dossiers clients…
- Protection (et réparation) : Intervient après qu’un salarié a subi un dommage ou une situation à risque. Le PSSM se situe dans ce champ :
- Il aide à identifier les signaux de détresse lorsqu’un salarié est déjà en difficulté.
- Il gère les conséquences des situations de crise (anxiété, burn-out, dépression) mais ne traite pas la source du danger.
Le PSSM est un outil complémentaire mais il ne remplace pas une politique de prévention des risques professionnels :
- Il agit après que les salariés soient impactés.
- Il ne traite pas les dangers ni ne réduit l’exposition aux risques.
🔎 Exemple pratique : Une entreprise de services financiers a intégré le PSSM des enquêtes anonymes régulières pour évaluer le stress et la satisfaction des employés, ainsi que des ateliers sur la gestion du temps et des relations interpersonnelles. Ce double axe de soutien (PSSM) et de prévention (gestion proactive des RPS) a permis de réduire les cas de burnout et d’améliorer le climat de travail.
Pour une politique de prévention efficace, il est indispensable de s’attaquer à l’origine des risques (dangers, exposition) et non uniquement à leurs conséquences.
Le PSSM peut alors être intégré comme un outil de protection, mais il ne peut pas être présenté comme une stratégie de prévention au sens strict.

