Dialogue social et participation des salariés : levier essentiel de prévention

par | Déc 4, 2024 | Comprendre les fondamentaux

Le dialogue social, clé de la prévention des risques professionnels en entreprise, pour garantir un cadre de travail sain et sécurisé.

Histoire du dialogue social en France

Le dialogue social prend ses racines à la Révolution industrielle du XIXᵉ siècle, marqué par les premières luttes ouvrières et la reconnaissance progressive des droits des travailleurs.

En 1864, le droit de grève est établi, et en 1884, la loi Waldeck-Rousseau légalise les syndicats, posant les bases du dialogue entre employeurs et salariés.

Il se structure au XXᵉ siècle, avec les accords de Matignon de 1936, impulsés par le Front populaire, qui introduisent des droits sociaux majeurs : congés payés, réduction du temps de travail, interdiction du travail des enfants…

Après la Seconde Guerre mondiale, les institutions comme les comités d’entreprise (créés en 1945) renforcent le dialogue social en permettant une représentation des salariés.

Le but du dialogue social a toujours été de garantir la justice sociale, de réduire les tensions sociales,  et de concilier les intérêts des travailleurs et des employeurs.

Cependant, les lois Rebsamen (2015), El Khomri (2016) et les ordonnances Macron (2017) ont profondément remanié le dialogue social, et affaibli la qualité.

•     Loi Rebsamen (2015) : Elle a introduit des changements significatifs dans les instances représentatives du personnel. Elle a notamment permis la fusion de certaines instances, comme la création de la délégation unique du personnel (DUP) élargie, regroupant les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT dans les entreprises de moins de 300 salariés. Si l’objectif était de simplifier le dialogue social, cette concentration a conduit à une dilution des spécificités et des compétences propres à chaque instance, rendant le dialogue moins spécialisé et moins efficace.

  • Loi El Khomri (2016) ou « loi Travail », a renforcé la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branche, notamment en matière de temps de travail. Cette inversion de la hiérarchie des normes visait à offrir plus de flexibilité aux entreprises. Cependant, elle a été perçue comme un affaiblissement des protections collectives, les salariés pouvant se retrouver en position de faiblesse lors des négociations.
  • Ordonnances Macron (2017), ont poursuivi cette logique en instaurant le Comité Social et Économique (CSE), fusionnant les principales instances représentatives du personnel. Si cette mesure visait à simplifier et dynamiser le dialogue social, elle a conduit à une centralisation des prérogatives, pouvant entraîner une surcharge de travail pour les élus et une moindre proximité avec les salariés. De plus, la réduction du nombre de représentants limite la diversité et la capacité à défendre les intérêts des salariés.

Impact global

Ces réformes ont affaibli le dialogue social en :

•     Complexifiant les missions des représentants du personnel, désormais chargés de multiples attributions sans nécessairement disposer des moyens adéquats.

•     Renforçant le pouvoir décisionnel des employeurs au détriment des négociations collectives équilibrées, notamment dans les petites entreprises où la représentation syndicale est faible ou inexistante.

•     Réduisant les espaces de concertation spécialisés, comme ceux dédiés à la santé et à la sécurité au travail, avec la disparition du CHSCT, ce qui peut nuire à la prévention des risques professionnels.

En somme, bien que ces lois visaient à moderniser le dialogue social, elles ont contribué à le fragiliser les instances.

Aujourd’hui il le dialogue social est inscrit dans le Code du travail, plusieurs dispositions sont prévues et reste un levier essentiel pour la démocratie en entreprise, l’amélioration des conditions de travail et la santé des salariés.

Le dialogue social : une nécessité pour toutes les entreprises

Que ce soit une multinationale ou une petite structure, le dialogue social est un pilier central de la prévention des risques professionnels. Valeurs essentielles

Dans un monde du travail en perpétuelle mutation, les entreprises doivent concilier performance et santé/sécurité des travailleurs. Pour cela, le dialogue social offre un espace d’expression et de co-construction des solutions, garantissant une prise en compte des spécificités de chaque entreprise.

Une démarche de prévention des risques professionnels se construit en impliquant tous les acteurs de l’entreprise.

Pour rappel les 3 valeurs essentielles :

Le respect des personnes : Il est essentiel que tous les acteurs participent activement à la prévention des risques professionnels. La prévention fait partie de la stratégie de l’entreprise pour assurer un environnement de travail sûr et sain et respecter la dignité de tous dans l’entreprise.

La transparence : l’employeur s’engage par des objectifs et des moyens, en énonçant les résultats visés. L’exemplarité du chef d’entreprise et de l’encadrement dans la mise en œuvre de la démarche de prévention est essentiel. La transparence également concernant la prise en compte de la réalité des situations de travail, la clarté dans la communication sur la santé et la sécurité au travail.

Et la dernière valeur essentielle est le dialogue social, en cherchant l’adhésion du personnel. Cela implique d’associer les instances représentatives du personnel : le comité social et économique (CSE,) ou la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) et les salariés.

En résumé, le dialogue social permet de discuter les problèmes, de réfléchir à des solutions, de réaliser des actions concrètes, correspondant aux réalités du terrain.

Dialogue social et participation des salariés

Le dialogue social et la participation des salariés sont des piliers essentiels de la gestion des relations professionnelles en entreprise.

Bien que distincts, ces deux concepts sont interconnectés et visent à promouvoir une collaboration constructive entre les différentes parties prenantes : employeurs, salariés, représentants syndicaux et institutions.

Le dialogue social : un cadre structuré pour échanger

Le dialogue social désigne l’ensemble des interactions entre employeurs et salariés, souvent par le biais de représentants, pour discuter des conditions de travail, des droits sociaux et des enjeux de l’entreprise. Il se traduit notamment par :

•     La négociation collective (exemple : accords d’entreprise).

•     La consultation des représentants du personnel, comme les comités sociaux et économiques (CSE).

•     Les discussions formelles ou informelles pour résoudre des conflits ou améliorer les pratiques.

Le but est de renforcer la coopération, prévenir les conflits et améliorer la qualité de vie au travail tout en veillant à la performance économique.

La participation des salariés : une implication directe

La participation des salariés va au-delà de la simple consultation ou représentation. Elle consiste à intégrer les travailleurs dans le processus de décision et d’évaluation, particulièrement dans des domaines qui les concernent directement, comme :

  • Les conditions de travail (sécurité, ergonomie, organisation, environnement de travail, ambiances, relations) ;
  • Les initiatives stratégiques (innovation, transformation numérique, communication) ;
  • La prévention des risques professionnels (identification des dangers, propositions d’amélioration).

Cette approche doit être perçue comme un levier d’engagement et non un frein, car elle valorise l’opérationnel, l’expertise terrain des salariés et les place au cœur de l’action.

Des dispositifs existent comme le management participatif, les cercles de qualité ou les groupes de travail en témoignent.

Ici, je parle bien de réelle participation, c’est-à-dire pas des pratiques qui visent seulement à faire illusion, ce que j’appelle aussi « fausse participation ».

Par exemple :

  • Une consultation symbolique où on invite les salariés à donner leur avis et qu’au final on n’en tient pas compte ou que la décision était prise avant la consultation.
  • Une communication descente déguisée en dialogue, l’entreprise organise des sessions d’informations qui sont présentées comme des temps d’échanges mais où les salariés n’ont pas la possibilité de s’exprimer ou encore mieux s’ils le font, ils reçoivent un avertissement à la suite. Cela ferme définitivement l’expression des autres salariés.

Articulation entre dialogue social et participation

  • Le dialogue social pose le cadre institutionnel et juridique pour les échanges (via les CSE, syndicats ou accords d’entreprise).
  • La participation des salariés est une extension directe, où les travailleurs ne se contentent pas de négocier mais contribuent activement à la mise en œuvre des décisions.

Par exemple :

Dans la prévention des risques professionnels, la participation des salariés est essentielle pour repérer les dangers au plus près du terrain et comprendre le travail réel. Le dialogue social, lui, formalise ces observations pour coconstruire des mesures adaptées. 

Le rôle du dialogue social dans la prévention des risques professionnels

Les risques professionnels incluent les accidents du travail, les maladies professionnelles, et l’évaluation de tous les risques professionnels.

L’implication des représentants du personnel, des syndicats et, idéalement, des salariés eux-mêmes, dans l’identification des risques est essentielle.

Un dialogue social de qualité permet de :

•     Identifier les risques qualitativement de l’entreprise grâce à une meilleure connaissance du terrain par les salariés.

•     Impliquer toutes les parties prenantes dans les démarches.

•     Adapter les mesures de prévention, pour qu’elles soient réalistes et efficaces, en tenant compte des situations de travail des salariés.

La mise en œuvre du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) illustre cette interaction.

Le DUERP peut devenir un véritable outil de prévention grâce à la concertation entre employeurs et salariés, lorsqu’elle s’accompagne d’un dialogue constructif.

Les défis et enjeux actuels

Si le dialogue social est bien affiché dans le paysage français, intégrer pleinement la participation des salariés pose certains défis :

•     Risque de confusion des responsabilités (employeurs vs salariés) ;

•     Nécessité d’un cadre clair pour structurer et prendre en compte la participation ;

•     Formation des salariés pour leur permettre une contribution efficace.

En somme, le dialogue social et la participation des salariés sont complémentaires.

Une approche équilibrée pour toutes les entreprises

Pour que le dialogue social soit une force dans la prévention des risques professionnels, il est crucial de trouver un équilibre.

Si la participation des salariés est un atout indéniable, elle ne doit jamais remplacer les responsabilités légales et morales de l’employeur.

Les petites entreprises, souvent en manque de moyens pour mettre en œuvre des dispositifs complexes, peuvent néanmoins instaurer des pratiques simples mais efficaces, comme :

•     Organiser des réunions régulières pour discuter des conditions de travail.

•     Mettre en place des boîtes à idées ou des canaux anonymes pour signaler des risques.

•     Sensibiliser les salariés aux enjeux de prévention, pour qu’ils deviennent actifs.

Instaurer une relation de confiance est essentielle pour avoir un dialogue social constructif et inciter la participation des salariés.

Le dialogue social, un levier universel mais exigeant

Le dialogue social reste un outil incontournable pour prévenir les risques professionnels.

Les entreprises, grandes ou petites, gagneraient à développer le dialogue social, la participation des salariés, afin de construire une collaboration équilibrée, où chaque acteur joue son rôle, en se respectant et en toute transparence.

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