DGI, droit d’alerte, droit de retrait 🤔?

par | Oct 29, 2024 | Réglementations et obligations

Je vous propose de revoir ensemble ces 3 termes prĂ©vus au code du travail pour mieux les connaĂ®tre et savoir ce qu’il faut faire quand ils sont utilisĂ©s.

Danger grave et imminent

Tout d’abord voyons la notion de Danger Grave et Imminent (DGI), que nous entendons souvent mais qui n’est pas défini en tant que tel dans le Code du travail, le droit d’alerte en cas de danger grave et imminent est traité un peu plus bas.
Le DGI trouve son origine dans la définition donnée dans la circulaire du 25 mars 1993 :

  • un danger grave est « un danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraĂ®nant la mort ou paraissant devoir entraĂ®ner une incapacitĂ© permanente ou temporaire prolongĂ©e Â».
  • l’imminence du danger concerne les situations de travail « oĂą le risque est susceptible de se rĂ©aliser brusquement et dans un dĂ©lai rapprochĂ© Â».
  • les risques pouvant produire des effets diffĂ©rĂ©s sur la santĂ© font partie de la notion de danger grave et imminent (ex : l’amiante, fumĂ©es de moteur diesel, chrome VI).
  • il n’est pas nĂ©cessaire que le dommage se produise de manière imminente, c’est l’exposition qui doit ĂŞtre imminente.

L’appréciation de la réalité d’un danger grave et imminent relève du tribunal judiciaire.

Le danger grave et imminent a par exemple été reconnu s’agissant :

  • dĂ©faillance des systèmes de sĂ©curitĂ©, le dĂ©faut de conformitĂ© des Ă©quipements de protection, notamment l’absence de dispositifs de sĂ©curitĂ© appropriĂ©s sur des machines dangereuses, a Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme un danger grave et imminent. Les salariĂ©s ont pu se retirer de leur poste jusqu’Ă  ce que ces protections soient rĂ©tablies (Cour de Cassation, Chambre sociale du 1 mars 1995 n°91-43.406)​ ;
  • Un salariĂ© avait invoquĂ© des agissements rĂ©pĂ©tĂ©s de harcèlement moral qui avaient entraĂ®nĂ© une dĂ©gradation de ses conditions de travail, avec des rĂ©percussions sur sa santĂ© mentale. La Cour de cassation a jugĂ© que les Ă©lĂ©ments prĂ©sentĂ©s par le salariĂ© (mails agressifs, certificats mĂ©dicaux) auraient dĂ» ĂŞtre analysĂ©s dans leur ensemble, ce qui laissait supposer un harcèlement moral justifiant l’exercice de son droit de retrait.(Cour de cassation, 25 mai 2022 n°20-19596) ;
  • L’utilisation de matĂ©riel Ă©lectrique dĂ©fectueux, prĂ©sentant un risque direct de choc Ă©lectrique, a Ă©galement Ă©tĂ© jugĂ©e comme un danger grave et imminent. Le salariĂ© qui avait refusĂ© de continuer Ă  travailler tant que les rĂ©parations n’Ă©taient pas effectuĂ©es a vu son droit de retrait confirmĂ© par la cour (Cass. soc., 10 mai 2001)​.

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Il a en revanche été écarté s’agissant :
– d’un droit de retrait mis en Ĺ“uvre par des Ă©ducateurs spĂ©cialisĂ©s Ă  la suite d’un incident violent au sein de leur Ă©tablissement, dans la mesure oĂą il s’agissait de risques inhĂ©rents Ă  la nature de leur travail compte tenu du public accueilli au sein de l’établissement (Cassation sociale du 9 mai 2012, n°10-27115) ;
– d’un droit de retrait exercĂ© par des chauffeurs de bus, fondĂ© sur l’agression d’un de leurs collègues travaillant sur une autre ligne (Cassation sociale du 27 septembre 2017, n°16-22224).

Droit de retrait

Passons maintenant au droit de retrait qui est un droit individuel et subjectif prĂ©vu par l’article L.4131-1 du Code du travail : « le travailleur alerte immĂ©diatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle prĂ©sente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santĂ© ainsi que de toute dĂ©fectuositĂ© qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d’une telle situation. L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activitĂ© dans une situation de travail oĂą persiste un danger grave et imminent rĂ©sultant notamment d’une dĂ©fectuositĂ© du système de protection Â».

Il doit être exercé de manière à ne pas créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent (article L.4132-1 du Code du travail).

Aucune sanction ou retenue sur salaire ne peut être appliquée du fait de l’exercice du droit de retrait. L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent.

A contrario, si l’exercice est manifestement abusif, une retenue sur salaire pour inexécution du contrat de travail peut être effectuée.

Son exercice non fondé ne caractérise pas l’existence d’une faute grave, mais peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Ces dispositions s’exercent le cas échéant sous le contrôle du juge.

En gros, on ne fait pas un droit de retrait toutes les semaines !

Les droits d’alerte

Les droits d’alerte, sont des outils pour le CSE, à distinguer du droit de retrait, qui concerne un droit individuel du salarié.

Un droit de retrait peut être l’élément déclencheur du droit d’alerte du CSE ou inversement. Mais ils peuvent aussi s’exercer séparément.

Il existe 5 possibilités d’alerte du CSE :

– droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertĂ©s individuelles (article L.2312-59 du Code du travail) ;

– droit d’alerte en cas de danger grave et imminent (articles L.2312-60, L.4131-2, L.4132-2 et suivants du Code du travail) ;

– droit d’alerte en matière de sante publique et d’environnement (articles L.2312-60, et L.4133-1 Ă  L.4133-4 du Code du travail) ;

– droit d’alerte Ă©conomique (article L.2312-63 du Code du travail et suivants) ;

– droit d’alerte sociale (articles L.2312-70 et L.2312-71 du Code du travail).

Faisons un focus en cas de Danger Grave et Imminent :
Lorsqu’un élu au CSE constate (ou un salarié lui fait constater en se retirant de la situation de travail) qu’il existe une cause de danger grave et imminent. Le CSE avise immédiatement l’employeur ou son représentant et il consigne cet avis.

L’alerte est consignĂ©e par Ă©crit sur le registre des dangers graves et imminents qui a Ă©tĂ© ouvert par l’employeur.

Cette alerte doit être datée et signée. Elle doit indiquer les informations suivantes :

  • Postes de travail concernĂ©s par la cause du danger constatĂ©
  • Nature et cause de ce danger
  • Nom des travailleurs exposĂ©s

Dès que l’employeur est avisé, il doit procéder à une enquête avec le représentant du CSE qui lui a signalé la situation et prendre les mesures nécessaires pour y remédier.

En cas de divergence, lors de l’enquête conjointe, sur la réalité du danger ou la manière de le faire cesser, l’employeur a deux obligations :
–    il doit rĂ©unir le CSE d’urgence, au plus tard dans les 24 heures ;
–    il doit informer l’agent de contrĂ´le de l’inspection du travail et l’agent du service de prĂ©vention de la Caisse rĂ©gionale d’assurance maladie. Ces derniers peuvent assister Ă  la rĂ©union du CSE.

À défaut d’accord entre l’employeur et la majorité des membres du CSE sur les mesures à prendre et leurs conditions d’exécution, l’employeur doit saisir l’inspecteur du travail.

En revanche, l’inspecteur du travail ne peut pas se prononcer en cas de divergence sur l’existence d’un danger grave et imminent, il en va de même pour les agents des services prévention.

Si tel est le cas, il revient au CSE ou à l’employeur de saisir le juge afin qu’il se prononce sur la légitimité de l’usage de son droit d’alerte.

Les étapes pour les appliquer

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Points Ă  retenir :

  • Droit d’alerte obligatoire : le salariĂ© doit signaler tout danger immĂ©diatement (article L.4131-1).
  • Pas d’obligation de retrait immĂ©diat : le salariĂ© peut dĂ©cider d’exercer un droit de retrait si le danger persiste après l’alerte.
  • Aucune sanction ni retenue de salaire ne peut ĂŞtre imposĂ©e

Points Ă  retenir :

  • Le salariĂ© doit signaler le danger avant d’exercer son retrait.
  • Le retrait est immĂ©diat en cas de danger grave et imminent, mais le salariĂ© doit rester Ă  disposition de l’employeur.
  • Aucune sanction ni retenue de salaire ne peut ĂŞtre imposĂ©e si le retrait est justifié​​.
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